OTAGES PAKISTAN - La Suisse dément toute rançon
Enlevés en juillet 2011 au Pakistan, les deux Helvètes ont réussi hier à s’échapper, selon le DFAE. De source talibane, une forte somme d’argent aurait été versée.
Sur les images filmées par des télévisions locales au Pakistan, ils apparaissent souriants et en bonne santé. Pour Olivier David Och, un policier de 32 ans du canton de Berne, et sa compagne Daniela Widmer, 29 ans, c’est la fin de huit mois et demi de captivité au pays des talibans, dans les zones tribales du nord-ouest du Pakistan.
La nouvelle a été confirmée hier à 15h30 par Didier Burkhalter. « Je voulais l’entendre pour le croire : il y a quelques minutes, j’ai pu leur parler. Ils sont libres et en lieu sûr », s’est réjoui le chef de la diplomatie suisse. Se basant sur cet entretien téléphonique, M. Burkhalter a affirmé que les deux otages enlevés en juillet 2011 dans la province pakistanaise du Baloutchistan « se sont échappés » de leur lieu de détention. « Ils ont fait preuve de beaucoup de courage », a observé le conseiller fédéral, en insistant sur le fait qu’aucune rançon n’avait été versée.
Circonstances floues
Didier Burkhalter n’en dira pas davantage sur les circonstances de cette libération présentée comme une évasion. Sur les sites d’information pakistanais, la nouvelle fait les gros titres. Sur les photos, on aperçoit Olivier David Och, barbe touffue, bonnet de laine sur la tête et revêtu d’une « shalwar kamiz » (longue chemise traditionnelle), et sa compagne Daniela, aussi habillée d’une longue tunique locale, descendre d’un hélicoptère sur le tarmac d’une base militaire à Rawalpindi. Selon des témoins, ils ont été pris en charge par des responsables de l’ambassade de Suisse à Islamabad. Leur retour au pays se fera « prochainement », selon Didier Burkhalter.
Que s’est-il passé hier à l’aube pour que les deux Suisses retrouvent la liberté après 259 jours de captivité ? Dans un premier temps, l’armée pakistanaise avait annoncé leur « libération sans condition », avant de se rallier à la version des deux intéressés décrivant une évasion.
Le site internet du FATA Research Center (FRC), un organe d’information indépendant actif dans les zones tribales, cite des sources talibanes qui maintiennent que les otages auraient été libérés après l’échange d’une rançon - aucun montant n’est prononcé, mais il pourrait s’agir de plusieurs millions de dollars - et suite à la libération d’une centaine de talibans des prisons pakistanaises.
A 3 heures du matin, relate le site du FRC, le couple s’est présenté à un poste de contrôle des forces de sécurité situé à 15 km de Miranshah, le chef-lieu du Waziristan du Nord, bastion des talibans non loin de la frontière afghane. De là, il a regagné Peshawar par hélicoptère, puis la base militaire de Rawalpindi.
« La Suisse ne verse pas de rançon dans ce genre de cas », a souligné le chef du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE). Face aux médias, Didier Burkhalter a aussi réfuté la thèse d’une rançon versée par le Pakistan et d’une éventuelle mise en scène de l’évasion du couple bernois.
Appel à la prudence
Olivier David Och et Daniela Widmer avaient été kidnappés le 1er juillet 2011 au Baloutchistan (sud-ouest du Pakistan) alors qu’ils circulaient dans un minibus Volkswagen transformé en camping car. Ils avaient voyagé en Inde et se trouvaient sur la route du retour, en direction de l’Iran. Selon la « NZZ am Sonntag » qui citait des politiciens pakistanais, Daniela Widmer aurait donné naissance à un enfant le mois dernier, mais l’information a été démentie par la suite. Sur les images diffusées hier après leur libération, il n’y avait pas trace d’un nourrisson.
Selon Didier Burkhalter, il ne reste maintenant plus qu’un seul otage suisse dans le monde. Le 1er février dernier, un taxidermiste saint-gallois de 46 ans avait été enlevé par des rebelles dans le sud des Philippines alors qu’il observait les oiseaux sur l’archipel de Tawi Tawi. Le DFAE rappelle que des conseils aux voyageurs sont publiés et mettent en garde contre les risques de kidnapping. « Dans certaines régions du monde, l’enlèvement est devenu une quasi-industrie », selon Didier Burkhalter.
Bertrand Fischer