Selon un r�cent sondage de l’hebdomadaire El Tiempo , Ingrid Betancourt est, avec 71 % d’opinions favorables, la personnalit� politique la plus populaire en Colombie, apr�s le pr�sident Alvaro Uribe, mais loin devant les candidats � la pr�sidentielle pour 2010. Les images de sa d�tention montrant la barbarie � laquelle elle est confront�e et la mobilisation de l’opinion en faveur d’un �change humanitaire, expliquent le regain de popularit� en Colombie d’Ingrid Betancourt, dont la personnalit� �tait fort controvers�e au moment de son enl�vement.
Les inqui�tudes que suscite son �tat de sant�, au vu des derni�res « preuves de vie » qui nous sont parvenues de la jungle, priment par-dessus tout. Mais le sondage d’ El Tiempo et le t�moignage de Luis Eladio Perez, un de ses compagnons de d�tention r�cemment lib�r�, nous incitent � nous demander si la Franco-Colombienne, une fois libre, pourrait repr�senter une option politique en Colombie.
Ancien parlementaire, Luis Eladio Perez a partag� une grande partie de sa captivit� avec Ingrid Betancourt. Il nous apporte un message in�dit. Il va jusqu’� dire que, si Ingrid est lib�r�e, elle sera un jour pr�sidente de la Colombie. Sa d�tention lui aurait donn� une vision globale des principaux enjeux pouvant mener � une pacification du pays. Malgr� ses �preuves, malgr� l’humiliation qu’elle subit depuis plus de six ans, Ingrid reconna�t que la seule issue au conflit arm� passera par une solution n�goci�e.
Perez affirme qu’Ingrid Betancourt s’est enrichie d’une sensibilit� sociale unique pendant ses ann�es de captivit�. Il nous apprend que l’otage a consign� ses r�flexions dans un document qu’elle conserve pr�cieusement comme une plate-forme politique. Son programme serait tr�s diff�rend des postulats politiques traditionnels. Au cours de sa d�tention, elle a compris qu’il y a deux pays : une Colombie urbaine et riche, face � une autre Colombie, celle de la mis�re. Avec une vision quelque peu romantique, elle a �labor� un programme de paix : un projet politique qui met en avant la r�alit� de la Colombie oubli�e et maltrait�e par la violence. Il r�pond � une seule question : comment peut-on reconstruire un pays avec une politique sociale coh�rente et soutenue dans le temps ?
Est-il r�aliste de concevoir une candidature d’Ingrid Betancourt � la pr�sidentielle dans un pays o� l’opinion se d�porte de plus en plus � droite et o� la popularit� d’un pr�sident � la « main dure » est de plus en plus grande ? Sans doute le succ�s du pr�sident Uribe aupr�s des Colombiens n’a qu’une seule cause : l’existence des Farc et le d�sespoir d’une opinion publique, fatigu�e de la guerre et satur�e de violence.
Apr�s six ans de d�tention, Perez croit � une inflexion de la strat�gie militaire des Farc. Il est convaincu que la gu�rilla a �volu� et qu’elle consid�re la solution n�goci�e comme une option importante. Cette solution devra passer par un �change humanitaire et aboutir � une reconstruction sociale, politique et �conomique du pays. Ingrid, sans rejeter l’option militaire, int�gre dans son programme la r�alit� de l’autre Colombie. Sans doute devra-t-elle concilier sa popularit� internationale avec son programme politique et avec le projet de paix, affirme l’ancien otage. Perez, qui repr�sente peut-�tre un dernier espoir pour la Franco-Colombienne, exposera cette semaine ses propositions au pr�sident Sarkozy. L’ancien otage cherche une formule visant � d�clencher un processus de lib�ration de tous les s�questr�s, avec la collaboration du pr�sident v�n�zu�lien Hugo Chavez et l’accord du pr�sident colombien.
Bien qu’il se garde de d�voiler ses propositions avant de les pr�senter mardi � l’�lys�e, celles-ci comporteraient trois �l�ments qui pourraient peser sur la gu�rilla en vue d’une n�gociation politique ult�rieure : la reconnaissance politique des Farc, l’�limination de la gu�rilla de la liste des organisations terroristes et une proposition d’asile permettant l’accueil des gu�rilleros sur le territoire fran�ais.
Le travail de Chavez et son rapprochement id�ologique avec les Farc, la disponibilit� du pr�sident Sarkozy � n�gocier un �ventuel retrait de la gu�rilla de la liste des organisations terroristes et l’�ventualit� d’un accueil en France de certains gu�rilleros : tout cela pourrait mettre fin au calvaire de la Franco-Colombienne. Il reste que la position du gouvernement colombien sera fondamentale pour donner vie � cette proposition. .
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Par Maria Fernanda Gonzalez, chercheur du Ceditec, universit� de Paris-XII.
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