OTAGES NIGER/MALI : Enlèvement d’un algérien et d’un français au Niger : Les otages transférés au nord du Mali
En dépit de la mise en état d’alerte des forces militaires maliennes dans la région frontalière avec le Niger, comme l’avait annoncé le ministre malien de la Défense, les deux otages, un Français et son chauffeur algérien (qui travaille pour une agence de voyages à Agadez), enlevés jeudi dernier à Tiguidan Tessoun, dans le nord du Niger, une région située à équidistance de la frontière avec l’Algérie à l’est et de celle avec le Mali au nord, seraient, selon des sources locales, sur le territoire malien depuis le 22 avril.
Le mouvement du cortège de véhicules les escortant aurait été observé par des locaux, dans la région de Bouressa, commune de Aguellhoc, où une autre partie du groupe de Abou Zeid les attendait. Selon nos interlocuteurs, le rapt aurait été organisé par quelques éléments de Abou Zeid (dont un Mauritanien connu dans la région) qui écument les régions nord-est du Mali et nord-ouest du Niger et qui ont pour zone de repli la région de Tessalit, au nord du Mali.
Ils auraient intercepté le véhicule du Français conduit par un Algérien, alors qu’ils sillonnaient les vastes étendues à la recherche d’éventuels touristes occidentaux, un « produit marchand » très rentable pour le renforcement de la logistique de leur organisation criminelle. Ils auraient auparavant relâché le chauffeur (pensant qu’il était Malien) à l’est de la zone de In Serri, avant de le rattraper après avoir découvert ses papiers dans la voiture, qu’ils ont passée au peigne fin. Tout de suite après, les deux otages ont été transférés vers le territoire malien, dans la région de Bouressa, commune de Aguelhoc, où bien évidemment, les kidnappeurs vont négocier leur libération.
Cette vaste étendue située entre l’Algérie, le Mali et le Niger a déjà été le théâtre de rapts d’Occidentaux. En janvier 2009, deux Suisses, un Allemand et un Britannique avaient été enlevés à Tillabéri, au Niger, puis transférés au nord du Mali ; une rançon avait été versée pour la libération de trois d’entre eux, alors que le quatrième, le Britannique Edyin Mayer, dont le gouvernement a refusé de céder aux exigences des preneurs d’otages, a été exécuté. Un mois auparavant, Robert Fowler, diplomate onusien au Niger, et son collègue Louis Guay ont été capturés par des contrebandiers dans la même zone, avant d’être revendus à des terroristes qui ont négocié une forte rançon pour leur libération quelques mois après.
Le ministre de la Défense malien avait déclaré tout de suite après le rapt des deux otages - français et algérien - qu’il avait mis « en alerte nos forces armées à la frontière avec le Niger, dans le cas où les ravisseurs tenteraient, comme d’habitude, de la franchir. Mais la zone à surveiller est très étendue et les ravisseurs connaissent très bien le terrain ». Comme d’habitude, les forces militaires maliennes n’ont pu empêcher les preneurs d’otages de regagner leur « planque » au nord de leur territoire. Elles ne pourront pas non plus leur couper les canaux de communication, qu’ils arrivent à trouver avec une facilité déconcertante, pour négocier une rançon, une grâce pour leurs acolytes arrêtés ou tout autre nouvelle revendication, tant que la volonté de faire céder les Etats à leurs exigences existe.
L’élargissement des quatre terroristes, dont deux Algériens et un Mauritanien réclamés par Alger et Nouakchott par des demandes d’extradition (pour leur implication dans des attentats terroristes) en contrepartie de la libération de Pierre Camatte, un officier des services français enlevé à Menaka, a non seulement suscité la colère des deux voisins du Mali, mais également encouragé les groupes salafistes à poursuivre leur stratégie de déstabilisation de toute la sous-région. Les rançons et, maintenant, le renflouement des rangs par d’anciens « compagnons d’armes » arrêtés par les services de sécurité n’ont fait que renforcer Al Qaîda au Maghreb dans ses positions, au nord du Mali, avec des groupes très mobiles qui franchissent les frontières, comme s’ils traversaient les quartiers.
Ce constat a poussé les Etats de la région à réfléchir à une riposte commune et amener le Mali à une plus grande coopération en matière de lutte contre le terrorisme. La réunion des ministres des Affaires étrangères de sept pays de la région et celle des chefs de leurs armées ont abouti à des déclarations de principe pour coopérer et riposter collectivement contre cette menace qui pèse sur toute la sous-région. Mais ce ne sont que des déclarations. Vingt-quatre heures après la mise en place, à Tamanrasset, d’un comité opérationnel militaire de suivi des opérations de lutte contre le terrorisme, constitué des armées de l’Algérie, du Mali, de la Mauritanie et du Niger, une autre prise d’otages est organisée et les captifs sont transférés au nord du Mali.
Cette fois-ci, les terroristes ont entre les mains un Français : un otage qui va leur rapporter vraiment gros puisque c’est certainement le président Sarkozy qui va se charger de gérer les négociations pour faire plier Bamako aux exigences d’Al Qaîda, même si c’est au prix d’une rupture des relations avec ses voisins directs. A la veille d’un référendum - que certains assimilent à une volonté de briguer un troisième mandat - le président malien va tout faire pour que le soutien de la France de Sarkozy ne s’émaille pas.